Faut-il avoir peur de la police ? Peut-on lui faire confiance ? Ces questions sont légitimes lorsqu’on arrive d’un pays où la corruption et la violence ont gangrené cette profession. L’Afrique, dont sont issues beaucoup de personnes immigrantes prises en charge par nos services, est particulièrement touchée par des comportements non professionnels, comme le révèle la récente enquête d’Afrobaromater, parue en début d’année 2024. Trente-neuf pays africains ont été passés à la loupe entre fin 2021 et mi-2023. Le constat n’est pas reluisant.
On ne sera donc pas surpris si beaucoup d’immigrants débarquent au Québec avec une image négative ou à tout le moins déformée de la police. Le vécu des uns et des autres – parfois douloureux – peut être la cause de préjugés qui ont la vie dure. D’où l’importance de communiquer pour battre en brèche ces perceptions. Et rassurer.
PRÊCHER PAR L’EXEMPLE
À Granby, le Service de police s’efforce d’informer les nouveaux arrivants. Catherine St-Jean est bien placée pour en parler en sa qualité d’agente à la prévention et aux relations publiques et communautaires. Elle reconnaît l’utilité de sensibiliser les personnes immigrantes au rôle des policiers québécois, en collaborant notamment avec SERY. Les classes de francisation figurent parmi ses interventions. Elle aimerait en faire davantage, consciente que le dialogue peut désamorcer certaines craintes. « On est là aussi pour leur faire comprendre que nous sommes des citoyens comme les autres, et qu’à ce titre nous ne sommes pas au-dessus des lois. Nous avons une discipline et une déontologie à respecter. »
Elle comprend les réticences que peuvent avoir les nouveaux arrivants qui ont vécu de mauvaises expériences avec la police dans leur pays d’origine. « Ils ne doivent pas avoir peur si un policier vient leur parler, ou penser que ça va mal se terminer. Nous ne sommes pas là pour leur nuire. » La gêne ou la peur peut par exemple les dissuader de contester une amende, alors qu’ils en ont parfaitement le droit au Québec, qui est une société démocratique. De même, s’ils estiment avoir été victime d’un abus de pouvoir ou maltraités par un policier, ils peuvent porter plainte sans craindre des représailles.
PRÉJUGÉS
À SERY, notre intervenante FPJ (Famille et protection de la jeunesse) confirme les préjugés des immigrants à l’endroit du corps policier. « C’est vraiment pas la première place où ils vont aller. » Force est de constater que les policiers québécois font en quelque sorte les frais de pratiques ou de comportements condamnables commis dans d’autres pays. C’est là que la prévention entre en scène. L’effort est permanent et le travail de longue haleine. « On martèle que la police est là pour les aider ».
Au sein de notre organisme, l’activité Espace parents permet entre autres de rappeler quel est le rôle des forces de l’ordre dans la société. « Les préjugés envers la police sont nombreux et la peur existe. Les immigrants que nous accueillons ne comprennent pas bien son rôle. Et ils ne connaissent pas leurs droits non plus en tant que citoyens lorsqu’ils arrivent au Québec. »
La tâche est d’autant plus ardue que certaines situations peuvent jeter le trouble chez les immigrants, comme le rappelle notre collègue en prenant l’exemple de la violence conjugale. « Dès qu’une personne porte plainte, la DPJ (Direction de la protection de la jeunesse) va se greffer au dossier dès lors qu’il y a des enfants (au sein de la cellule familiale); ça veut dire le risque qu’on te retire ton enfant. Dans leur compréhension, la police est une une arme à double tranchant. Ils ne vont pas forcément la percevoir comme une amie. » Et d’ajouter, pour conclure : « Il y a beaucoup de bouche-à-oreille dans les communautés. Quelqu’un qui a vécu une mauvaise expérience va le dire à son voisin, qui va le dire à son voisin, etc. Cette rumeur peut déformer la réalité. »
Il est possible de visiter en groupe le Service de police de Granby. Il suffit de contacter Catherine St-Jean à cette adresse : cst-jean@granby.ca; ou à ce numéro : 450-776-8333, poste 3704.